Esteban Sohet et Quentin Vanhoof lancent « Oddity » sur le marché à la recherche d’acheteurs potentiels

par MPAGE le 14 mai 2018

Deux anciens stagiaires de la cuvée Motion Design 2017 ont eu la chance d’être sélectionnés pour participer à la première aventure du R/O Institute : une formation au « Storytelling » transmédia de 8 mois avec à la clé, une production qui sera proposée sur le marché des producteurs audiovisuels.

Oddity est une licence en copropriété avec le R/O et les grands acteurs des médias belgo-français tels que Dargaud, Dupuis, Lombard, la RTBF, Wallimage… Prochaine étape, le tour des producteurs pour financer cette licence et la diffuser internationalement à travers différents médias : d’abord le jeu vidéo puis, selon le succès, des applis pour mobiles, une série TV, des aventures en films d’animation ou en BD voire, soyons fous, des productions de longs-métrages. L’aventure continue donc encore durant 18 mois.

Mais au fait, qu’est-ce qu’une licence ?

Durant ces quinze dernières années le monde des médias dans le domaine de la fiction s’est complètement transformé et diversifié. Que ce soit dans le marché de la série, de la production de fictions, de films d ’animation ou de jeux vidéo, on assiste à une explosion des produits dérivés qui multiplie parfois par 10 les profits générés par ce biais.Pour exemple, « La Reine des Neiges », gros succès des studios Disney, c’est 1 milliard de dollars de recettes au cinéma et, en moins d’un an, plus de trois millions de déguisements des deux héroïnes, Elsa et Anna, vendus aux États-Unis. En 2014, les productions aux grandes oreilles n’engrangeaient pas moins de 40 milliards de recettes sur ses produits dérivés.

Cette nouvelle donne a complètement changé le paysage de la production dans ce secteur et a mené à repenser le métier et la stratégie de concepteur d’histoires et de scénarios.

Le storytelling aujourd’hui conçoit et développe non plus des scénarios classiques, fermés en fonction d’un média. Dès le départ, une « bible » s’élabore pour définir les structures d’un univers, les caractéristiques de personnages, les règles de fonctionnement qui permettront de déployer des aventures de manière optimale quels que soient les médias, les supports, les plates-formes sur lesquels ces histoires seront transposées.

On comprend dès lors, au vu des profits prévisionnels, que la recherche de coproducteurs, la faisabilité et la viabilité d’un projet sont directement liées à la cohérence et la pertinence de la « bible » et des possibilités de rentabilité qu’elle dégagera.

C’est cette nouvelle orientation dans le métier des « raconteurs d’histoires » qui a amené l’équipe du R/O Institue avec à sa tête Domenico La Porta à créer cette formation à Charleroi, berceau de la BD belge et vivier des plus grands scénaristes belges.

R/O : À l’origine des histoires…

Sur le site web du R/O Institue, très vite le ton est donné : « Le monde appartient à ceux qui racontent des histoires. Avez-vous une histoire à raconter? Parfois, une plate-forme ne suffit pas à couvrir tout le spectre de votre idée. Avez-vous déjà des plans pour un film, une série télévisée, une bande dessinée ou peut-être un jeu que vous souhaitez développer ? Que diriez-vous des ambitions pour tous et plus ? Mais vous êtes un conteur et vous ne savez probablement pas par où commencer… ».

Le coaching professionnel provenant d’une grande variété d’experts va droit au but et s’articule complètement autour de la pédagogie de projet, c’est à proprement parler une véritable « école professionnelle », tout est en rapport et focalisé sur le métier et le suivi du produit pour finaliser sa commercialisation.

Sur une période de 8 mois, cette formation se fait au travers de conférences publiques et privées, d’ateliers, de séances de travail individuelles et de groupe. C’est en tout plus de 40 experts internationaux qui viennent partager leurs compétences.La formation R/O vise à peaufiner l’éventail complet du projet de l’essence de la narration à la stratégie marketing et à l’architecture d’un modèle au cas par cas.

 

8 mois d’une aventure passionnante

L’aventure avait démarré sur les chapeaux de roues : sélection des 10 équipes de 3 candidats pendant une semaine de huis clos avec pour objectif de produire l’idée, l’ébauche graphique et les grandes lignes d’une « bible » pour une licence qui serait travaillée durant les 8 mois de formation si l’équipe était retenue1.

Quentin Vanhoof et Esteban Sohet expliquent les conditions et le déroulement du stage dans la vidéo en fin de cet article ci-dessous, vidéo également visible sur la chaîne Youtube du Cepegra2.

C’était chaud, l’aventure continuait sur le même mode que la semaine de sélection, toujours partagée entre formation et réalisation du projet :

Quentin : « En scénario, Xavier Dorisson3 a une méthode complètement à l’opposé de celle transmise par Karen Guillorel4 que l’on avait eue une semaine avant. Il est tellement habitué de travailler avec un média qui fait 48 planches, qu’il est enfermé dans sa case de BD. Le scénario ça doit être simple, percutant, allez à l’essentiel. Parce que vous n’avez pas le temps de tergiverser, le bon scénario c’est celui qui rentre dans une planche. Karen, c’était plutôt : il y a une rivière que le personnage doit traverser. Depuis le début, les civilisations se sont toujours installées près des rivières, donc tu vas me décrire tous les villages qui sont installés le long de cette rivière et me dire sa source et où elle se jette!

Xavier a vraiment été un choc et cela nous a aidés car on avait un énorme monde et il nous a dit d’aller à l’essentiel : Votre énorme monde il est très joli mais moi, je veux une histoire simple, percutante et efficace. »

Esteban : « Et quand l’histoire retombe, stagne ou quand il ne se passe plus rien et bien, reviens au moteur le plus important : le conflit ! ».

 

 

Quentin : « La méthode du R/O ça a vraiment été à chaque fois de nous présenter des experts avec des avis très différents pour nous faire prendre le contre-pied afin qu’on voie, quel que soit l’angle d’attaque, où ça capotait dans notre projet. »

Esteban : « Moi, c’est Pascal Degrune5 qui m’a beaucoup aidé, c’est lui qui nous a permis de faire notre prototype, il a fait des artworks pour nous et m’a permis de perfectionner le digital painting. »

Et Esteban revient aussi sur le travail de Domenico La Porta, directeur mais aussi formateur du R/O :

Esteban : « On n’en parle pas assez mais dans ceux qui ont créé le projet, Domenico est quelqu’un qui est très bon dans la communication. Il nous a montré comment vendre un produit, il a pris un Spirou de Dupuis et nous l’a vendu comme si c’était la 7e merveille du monde. Et, à la fin, je peux vous assurer que chacun voulait l’acheter ce Spirou alors qu’on l’avait tous reçu gratuitement dix minutes avant !

Il nous a appris à simplifier, mettre l’accent sur ce qui est essentiel dans la licence car on parle de quelque chose qui va s’adresser à énormément de personnes. Chacun va vouloir apporter son petit plus et c’est aussi quelque chose qui ne peut pas être trop cadenassé, car si on est bloqué dans ses idées, ça ne peut pas fonctionner. Il nous a appris à aller à l’essentiel et à rester flexible. »

Quentin : « David Russel6 nous a aussi appris dans une conférence à synthétiser une idée et comment quelques illustrations pouvaient avoir une force
pour faire comprendre les intentions d’un projet […] C’est une chose de dire que le cinéma c’est un art graphique et que les images ont une force mais voir comment créer une image qui impacte les gens, c’était un art abstrait pour nous. Il a mis des choses en lumière par son analyse de la construction de l’image. […] à travers des exemples de grands films, pour une fois, la puissance d’une image ce n’était plus un concept, c’était très clair, c’était vraiment un art. »

Oddity : un jeu vidéo qui défie les lois de la physique newtonienne.

Quel avenir maintenant pour Oddity ?

Quentin : « Littéralement, le projet c’est un 50/50, la moitié appartient au R/O et ses partenaires, l’autre moitié est à nous, Esteban, Pierre et moi. Ils s’engagent à faire tout leur possible pour que cette licence démarre et dans un délai de 2 ans, s’ils n’arrivent pas à la vendre, nous en redevenons propriétaire à 100 % . »

 

De g. à d., Quentin Vanhoof, Pierre Hageman (sorti de l’IAD, scénariste du projet Oddity) et Esteban Sohet.

En attendant les retours de la prospection, Quentin a vraiment trouvé sa voie et c’est là, dans cet univers où il veut travailler et si possible développer des projets personnels.

Pour Esteban, l’expérience du R/O a vraiment mis en lumière que c’est ce qu’il veut faire de sa vie, que : « Ce n’était pas un rêve de gosse, c’est ce qui [lui] donne envie de se lever le matin ». Il va continuer à prospecter pour travailler dans des grosses structures, améliorer ses compétences et aller encore plus loin.

Croisons les doigts et espérons que l’exemple de nos anciens Motion Designers sera suivi par d’autres talents dans ces nouvelles compétences à la pointe du storytelling, dispensées ici à Charleroi au R/O Institue.

1 Voir l’article paru dans Graphic Side of Life le 01/2017
https://graphicsideoflife.be/deux-stagiaires-motion-designer-embarques-dans-laventure-du-ro/

2 Voir la vidéo de l’interview de nos deux anciens stagiaires sur
http://bit.ly/QuentinEstebanROInstitute

3 Xavier Dorisson notamment est le créateur de la série « Undertaker » chez Dargaud
http://www.dargaud.com/bd/Undertaker/Undertaker

4 Karen Guillorel : Scénariste spécialisée transmédia
http://www.cheminsdetoiles.com/page/30651

5 Pascal Degrune : Concept artist et Visual development et Film director, a collaboré notamment avec : Franco Dragone, Fabrice Murgia, Jaco Van Dormael…
http://www.pascaldegrune.com/wp/

6 David Russell : Storyboarder américain, a travaillé sur les plus grandes productions des Majors aux USA, crédité notamment sur : Batman, Star wars,
The Wolverine, Qui veut la peau de Roger Rabbit…
https://www.dynamicimagesdr.com/about

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