Paris Web 2017 : Accessible, mais peut mieux faire…

par Michèle Vos le 8 janvier 2018

On ne boude jamais les événements qui se produisent dans le milieu WEB francophone tant ils sont rares et proches de nos problématiques de création et fabrication. Ces conférences favorisent les rencontres et la proximité des orateurs humanise évidemment bien plus nos échanges. C’est pour ça que, de prime abord, Paris Web semble toujours une destination de premier ordre. Cependant, d’année en année, ce rendez-vous ressemble plus à une habitude qu’à un choix. Les sujets se répètent ou ont du mal à se renouveler pour combler les vides dans nos pratiques de création. Il est, malgré ce constat, difficile de juger de la qualité d’un événement sans y participer et comme quelques bonnes pointures répondent à l’appel… Go to Paris !

Voici une sélection de sujets qui nous ont séduits :

Mavo – Léa Verou

Léa Verou est mondialement reconnue comme conférencière sur des sujets web pointus ainsi que pour son travail au MIT CSAIL et son implication en tant qu’experte CSS au W3C.

Léa Verou

Elle nous présente ici sa plateforme MAVO, projet open source dont la vocation est de transformer nos créations statiques en pages dynamiques. L’intégration de liaisons mavo JS et CSS ainsi que l’ajout d’attributs spécifiques sur nos objets HTML permettent de rapidement transformer nos pages en webapp. Celle-ci pourra stocker localement ou non ses données sans avoir à passer par du développement spécifique. Cette plateforme se veut accessible, flexible et open source. Sur présentation le projet semble relativement séduisant pour un public non-développeur. Qu’en est-il dans la réalité et que pourront en retirer les développeurs ? À suivre donc…

Webfonts – Chris Lilley

Chris Lilley est rock star du web de par sa bio impressionnante et son implication dans les standards (coauteur du PNG, coéditeur des CSS niveau 2 publié en 1998, président du groupe de travail sur le WOFF, le SVG…). Il est l’une des figures incontournables de l’évolution des normes techniques dans l’infographie web au W3C tant pour la couleur que pour la typographie. Et ici, à Paris Web, il vient nous présenter certaines propriétés CSS applicables à nos webfonts (dont quelques-unes écrites par lui-même) et nous dévoiler de futures « specs » ainsi que leurs évolutions.

Chris Lilley

Que ce soit pour ne charger qu’un « range » (choix) de caractères d’une police (en ciblant son unicode), contraindre l’alignement tabulaire d’une police sans largeur fixe, activer les ligatures de caractères ou encore forcer l’affichage du style graphique de vos chiffres, Chris nous montre que les possibilités d’affichage de nos polices via CSS dépassent souvent l’imaginaire graphique des webdesigners. Le support du WOFF2 optimise la compression de nos fontes. On peut aussi travailler sur les performances d’affichages en cas de chargement long via le « font-display ».

Et pour le futur ? Pimp my font ? Oui, on avait déjà des polices de caractères colorisées pour les enluminures (rare) et surtout pour les émojis (courant). Mais il était impossible d’éditer la palette d’une police colorée ni d’ajuster le jeu de couleurs qui la constitue. C’est dorénavant envisageable avec les CSS4 et la règle @font-palette-values. Évidemment ce ne sera pas applicable pour tous les usages mais grâce à cette méthode, on pourra enfin piloter les nuances des icônes d’une interface en fonction des fonds sur lesquels elles se trouvent, ou créer une police d’avatar personnalisable.

Grégory Fichère

“Alors, qu’y a-t-il dans ES2020 ?”
Christophe Porteneuve

Christophe Porteneuve, auteur incontournable en matière de programmation web nous brosse un état des lieux sur l’évolution de l’EcmasScript ces dernières années. Pour rappel, l’Ecmascript (ECMA-262) est un standard normatif appliqué à différents langages scriptés tel que le JavaScript; une sorte de norme ISO du code. L’objectif, outre l’ajout de fonctionnalités, est d’améliorer la syntaxe et la lisibilité du code. Un script ainsi codé est théoriquement compréhensible par tout programmeur qui serait amené à reprendre un code tiers.

Christophe Porteneuve

Après un bref rappel du processus de recherche et validation de la norme ECMA, aussi appelée TC39, Christophe Porteneuve cite les différentes versions utilisées et à venir:

ECMAScript Edition 5 et 6 (ES5, ES6 / ES2015)

Les normes ES5 () et ES6 sont pratiquement supportées dans tous nos navigateurs (avec l’aide de Babel.js pour ES6 et suivants).

ECMAScript Edition 7 (ES2016)

Contrairement à ses prédécesseurs, ES7 n’est pas encore applicable nativement dans les navigateurs. Il faut donc utiliser Babel.

ES7 apporte son lot de nouveautés comme l’application des virgules terminales dans les déclarations de fonctions et une amélioration de l’écriture de code asynchrone basé sur des promesses, le rendant beaucoup plus facile à comprendre.

ECMAScript Edition 8 (ES2017)

Sans aucun doute l’évolution qui nous concerne plus, ES2017 continue sur la lancée d’ES2016. La voie est clairement ouverte pour le code asynchrone avec, notamment, les itérations et fonctions asynchrones, la possibilité de créer des champs hors constructeurs et champs privés.
Cette édition propose également de considérer les paramètres du reste (Rest) et opérateur de décomposition (Spread) comme comportements par défaut. De quoi simplifier nos fonctions !

Au programme figurent également l’import dynamique de modules à la volée ou encore l’amélioration des RegExp qui vont plus loin dans l’utilisation de résultats et l’ouverture à l’unicode.

ECMAScript Edition 9 (ES2018)

Encore au stade 2 de son développement au TC39, l’édition 2018 d’Ecma présente déjà quelques propositions intéressantes telles que les méthodes et accesseurs privés, le passage en expression des throw, les décorateurs ou les très attendus séparateurs numériques.

Conclusion… et ES2020 alors ?

Christophe Porteneuve conclu sur l’avenir d’ECMAScript dans sa mouture ES2020. Si il est bien trop tôt pour savoir exactement ce que couvrira cette édition (mais on parle déjà de chaînage optionnel et de protocoles de classes), on retiendra que ces dernières années l’évolution des langages scriptés tel que JavaScript est notables.

Toujours plus moderne, puissant et plus lisible, JavaScript s’assure d’un avenir brillant grâce à cette constante normalisation. On est loin du “petit langage navigateur pour bricoleurs“ d’il y a quelques années.

Recreating the ZX Spectrum loader with Web APIs
Remy Sharp

Remy Sharp

Il fallait bien compter sur Remy Sharp pour nous présenter un projet personnel de recherche hors du commun: reproduire en JavaScript le chargement des données d’un ordinateur vintage, le vénérable Sinclair ZX Spectrum de 1982 !

 

De l’analyse du fonctionnement du mécanisme de chargement d’un programme depuis une cassette audio jusqu’à la démonstration d’un prototype fonctionnel recréé en JavaScript, Remy nous emmène dans une aventure technique passionnante, teintée de nostalgie et de retours très personnels.

Au final, Rémy Sharp nous démontre le challenge de déconstruire et comprendre une technologie vieille de 30 ans en la recréant à l’aide d’outils web gratuits (JavaScript et HTML 5).

Projet perso n° 42 : une aventure ultrasonique
Hubert Sablonnière

Dans nos métiers, nous sommes pour la plupart des passionnés. Il n’est pas rare qu’en dehors de nos heures de travail, nous utilisions les mêmes outils pour notre plaisir, à des fins de curiosité… Mais où est donc la frontière entre notre travail et notre passion ? Qu’est-ce qu’un projet personnel ? Et pourquoi sommes-nous si difficilement compris par notre entourage ?

C’est sur ces questions que démarre l’exposé d’Hubert Sablonnière. Faisant écho à Rémy Sharp, il nous expose la vie d’un de ses projets : faire communiquer deux ordinateurs via l’ultrason et en utilisant des technologies web classiques (JavaScript et HTML 5). De la recherche à la mise en pratique, Hubert nous raconte son aventure, les différents challenges rencontrés, l’expérience et le plaisir dégagé.

Finalement, un projet personnel c’est quoi ? Un challenge sans contraintes que l’on se donne pour le plaisir d’apprendre, de manipuler… ce même plaisir que nous avions enfant à découvrir et expérimenter le monde qui nous entoure. Là se trouve la vraie valeur d’un projet personnel.

Nous sommes ressortis de cette conférence boostés, avec le sentiment d’avoir renoué avec cet émerveillement enfantin que nous éprouvions en découvrant l’informatique et la programmation. De quoi relancer nos propres projets persos ? Merci Hubert.

Olivier Belery

Conclusion

Dans sa globalité, nous avons un avis assez mitigé sur l’édition 2017 de Paris Web. Si certaines conférences, notamment celles reprises dans le présent article, étaient très intéressantes, d’autres en revanche manquaient cruellement de matière et proposaient des sujets assez improbables en 2017 (beaucoup de redites, de sujets promotionnels ou irréalistes).

Cette édition 2017 affiche fièrement l’étendard de l’accessibilité et c’est très bien. Ce qui l’est moins c’est le manque de sujets dans d’autres disciplines… Du fonctionnel UX, du visuel UI ou de la technique code auraient, à notre sens, pu enrichir cet événement attendu par beaucoup. On aurait également aimé parler de sujets plus contemporains comme la VR, React, AMP HTML project de Google…

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